Même si le sujet est moins bien connu, moins documenté, voire tabou, les hommes aussi sont parfois victimes de violence conjugale. Une réalité qui interpelle l’organisme Via l’Anse.
L’organisme s’est vu octroyer récemment une aide financière de 50 000 $ pour un projet de recherche sur les besoins spécifiques des hommes victimes de violence conjugale. Cette somme provient du Fonds d’aide aux victimes d’actes criminels.
Selon la professionnelle de recherche Christine Drouin, ce projet vise à documenter la réalité de ces hommes, l’aide à laquelle ils ont accès (ou pas accès), mais aussi à élaborer des outils d’intervention afin de mieux les encadrer.
Le coordonnateur de Via l’Anse, Mario Trépanier, rapporte des chiffres de Statistique Canada voulant que seulement 20 % des hommes victimes de violence conjugale font appel à un service d’aide. «Chez Via l’Anse, 25% de nos interventions concernent des femmes violentes», dit-il.
Déjà, certaines informations sur cette problématique émanent à la lumière de 8 entrevues réalisées avec des sujets victimes de violence de la part de leur conjointe. «Même si cette violence peut parfois être physique, on parle avant tout de violence verbale et psychologique», précise Christine Drouin. Cela peut prendre la forme de menaces, de manipulation, d’humiliation, de crises de jalousie, d’une recherche de contrôle des activités du conjoint, voire de l’espionnage dans son téléphone cellulaire ou son ordinateur. Dans un seul cas, une femme avait une propension à menacer son conjoint avec un couteau.
Cependant, les hommes ont de la difficulté à s’apercevoir qu’ils sont victimes. «Ils voient ça davantage comme un problème d’humeur ou de santé mentale de la part de leur conjointe», explique la chercheuse. Certains ont déjà une attitude de dépendant affectif ou prennent le rôle de super sauveur.
Néanmoins, ils peuvent en venir à éprouver des symptômes post-traumatiques (7% des cas), de l’anxiété, de l’angoisse, à la simple idée de revenir en retard à la maison ou de savoir que leur conjointe va être d’humeur massacrante. Parfois au point d’aller consulter.
Stéréotypes
Si les femmes demeurent toujours les principales victimes, le nombre de victimes masculines a augmenté de 36 % depuis 2003, tandis que le taux chez les femmes a augmenté de 4 % pour la même période, selon les statistiques du ministère de la Sécurité publique du Québec.
Dans les communautés en général, les hommes victimes de violence conjugale ne sont pas toujours pris au sérieux. Ils demeurent victimes des réflexes qui se sont développés depuis 20 ans dans les cas de violence conjugale.
«Les policiers sont mieux équipés pour intervenir lors de chicanes de couple mais souvent, s’ils ne prennent pas le temps de poser des questions, ils considèrent d’emblée que c’est l’homme qui pose des gestes violents», soulève Mario Trépanier. De là, l’importance de mettre chaque situation en contexte.
C’est aussi vers quoi tendra la 2e étape du projet de recherche, c’est-à-dire de travailler de concert avec diverses ressources du milieu afin de développer une nouvelle approche, notamment des organismes comme Le Pont du Suroît et le Centre d’Aide aux Victimes d’Actes Criminels (CAVAC).
D’autres intervenants tels la Sûreté du Québec, le CSLC, la Protection de la Jeunesse et le Directeur des Poursuites Criminelles et Pénales (DPCP) ont aussi manifesté leur intérêt pour agir en ce sens.

