Inquiète pour ses parents sous les bombes en Ukraine
Établie à Salaberry-de-Valleyfield depuis sept ans, Victoria Bohdanova vit des heures angoissantes depuis que la Russie de Vladimir Poutine a décidé de mettre le pied en Ukraine, là où se trouvent encore plusieurs membres de sa famille.
Ses parents, âgés de 69 ans et 72 ans respectivement, de même que sa sœur, son mari et leurs deux enfants, demeurent en banlieue de Kiev, la capitale où les bombardements se sont multipliés depuis jeudi dernier.
« Je suis en contact régulièrement avec eux par téléphone, raconte l’Ukrainienne de 40 ans. Parfois, j’entends les bombes qui explosent autour d’eux », poursuit-elle, espérant que les transmissions téléphoniques ne soient pas interrompues.
Les parents de Victoria demeurent très attachés à leur patelin et hésitent toujours à tout laisser pour se réfugier ailleurs, comme en Pologne, où plusieurs ont été accueillis ces derniers jours. Mais ils devraient s’y résigner, assure-t-elle, juste pour ne pas avoir à vivre de nouveau sous la botte communiste.
Sa sœur, son beau-frère, de même que son neveu, âgé de 18 ans, ont cependant été contraints de trouver refuge dans le sous-sol d’une église. Comme l’exige le pouvoir ukrainien, tous les hommes âgés entre 18 et 65 ans ne peuvent quitter le pays et sont mobilisés afin de contribuer à la résistance.
Le beau-frère et le neveu de Mme Bohdanova ont donc rejoint les brigades de bénévoles qui travaillent à démasquer les infiltrateurs russes qui sévissent dans le secteur de la capitale. « Ces partisans russes appliquent de la peinture fluorescente sur certains bâtiments afin que l’aviation russe puisse mieux les avoir comme cible », explique Victoria. Une information qu’a d’ailleurs confirmée la correspondante de la SRC à Kiev, Geneviève Bédard.
Le chaos
Les informations que la Campivallensienne a pu obtenir de ses proches laissent voir une situation chaotique en Ukraine et dans les secteurs entourant la capitale.
« Tous les gens sont mobilisés, dit-elle. Les hôpitaux sont débordés, on improvise des collectes de sang pour répondre à la demande et les gens doivent surtout se méfier de la propagande russe qui abonde sur les réseaux sociaux là-bas afin de démoraliser les insurgés. Plusieurs embarquent dans cette propagande et voient Poutine comme un libérateur, ce qui est totalement aberrant. »
La ressortissante se réjouit néanmoins à l’idée que l’offensive russe ait été contenue férocement par les forces ukrainiennes. « Poutine n’avait pas prévu une telle résistance, il prévoyait une guerre éclair qui lui aurait permis d’atteindre Kiev et prendre le pouvoir. »
Victoria demeure néanmoins dans l’angoisse d’apprendre une mauvaise nouvelle d’une minute à l’autre. Elle se dit toutefois encouragée par les sanctions économiques préconisées par plusieurs pays et par le support moral de plusieurs concitoyens et amis qui la côtoient.
Depuis des décennies, l'histoire de l'Ukraine est ponctuée par la menace russe, rappelle Mme Bohdanova, particulièrement depuis la Révolution russe de 1914, qui a vu le regroupement de l'Ukraine au sein de l'ancienne URSS. Avec l'effondrement de l'URSS en 1989, l'Ukraine a pu retrouver son indépendance, à divers degrés, en fonction des gouvernements au pouvoir, qu'ils soient plus ou moins proches de la Russie.
Selon elle, les Ukrainiens ont goûté à la démocratie et ne veulent pas se la faire enlever de force. "Même si tout n'est pas parfait, les gens préfèrent être libres de choisir leurs dirigeants."
Il y a 9 ans maintenant, la ressortissante a quitté son pays par désir de voyager. "J'avais des amis qui habitaient à Toronto et qui m'ont d'abord accueillie", rappelle-t-elle. Puis, elle a pris le chemin de l'Alberta durant deux ans, pour ensuite venir s'établir au Québec, à Salaberry-de-Valleyfield, où elle occupe un emploi dans une agence de voyage.
Elle a pu bénéficier des services d'intégration offerts par le CRESO et apprendre le français en fréquentant le centre de francisation L'Insulaire.